L'un des fondements
essentiels d'une bonne hygiène intérieure repose sur un simple
exercice consistant à détendre ce qui est inutilement tendu.
Inutilement tendu, nous le sommes, en effet, et beaucoup plus que
nous n'en avons généralement conscience. Je ne parle même pas du
stress ordinaire et de toutes les tensions physiques et psychiques
auxquelles nous nous trouvons couramment soumis, mais d'une tension
d'autant plus insidieuse qu'elle nous paraît normale, si bien que
nous ne la remarquons pas ou à peine.
Un peu d'observation de
nous-même lors d'une journée ordinaire va nous faire sauter aux
yeux cette évidence! "je suis tendu vers", constamment
tendu vers... Vers quoi au
juste?
Vers tout à l'heure, vers
le moment suivant, vers la fin de l'action en cours, même anodine.
Un exemple? Je fais la queue à la caisse d'un magasin où je viens
de faire mes courses. Il me suffit de regarder honnêtement ma
posture intérieure pour constater que je suis bel et bien "tendu
vers": tendu vers le moment où, enfin ce sera mon tour, où je
pourrai régler mes courses et passer à la suite de ma journée. Je
ne me tiens pas là détendu, ouvert, disponible, je ne profite pas
de ce moment où je n'ai rien de particulier à faire pour respirer,
me mettre dans mon axe, regarder autour de moi... Je suis
intérieurement arc-bouté vers tout à l'heure, comme si mon être
intérieur était pour ainsi dire en avant, décalé par rapport à
l'instant.
En fait, je considère
automatiquement qu'il m'est impossible d'être simplement en paix, ici et
maintenant.
Quand je serai à la
caisse, quand ce sera mon tour, quand j'aurai réglé mes courses,
alors je pourrai être en paix, enfin! Sauf qu'alors je serai de
nouveau tendu vers... Ma destination, la suite de ma journée, etc...
Autre exemple quotidien,
j'attends le métro, le train, le bus, que le feu piéton passe au
vert... Là encore, je suis tendu vers. Plutôt que de profiter de ce
moment d'"entre-deux" pour goûter l'instant, je piaffe "en
attendant" le moment où, enfin, le métro arrivera, où, enfin,
je monterai dans le bus, où enfin, je traverserai.
La paix et la détente
sont toujours pour tout à l'heure, plus tard, dans un instant, telle
une carotte reculant sans cesse devant la bouche de l'âne.
Ces petits exemples
peuvent paraître anodins. De fait, ils le sont. Et pourtant, quelle
dépense d'énergie inutile, quelle mobilisation en pure perte, quel
dommage de ne pas s'accorder tout au long de la journée des moment
pour simplement respirer, s'ouvrir à la vie et revenir à soi-même.
Une journée ordinaire, y
compris celle où nous sommes convaincu d'être très occupé, est
parsemée de ces moments "inutiles", "moments perdus"
où, en vérité, je n'ai rien d'autre à faire et ne peux rien faire
d'autre qu'être là où je suis : moments d'attente, de déplacement
d'un point à un autre.
Le simple exercice
consistant à prendre appui sur ces moments pour expirer, se
détendre, se mettre pour ainsi dire à la verticale de soi-même, ce
simple exercice peut considérablement modifier le climat de nos
journées. Alors, pourquoi ne pas le tenter?
(article dans
le magazine Kaizen - juillet:août 2016)
Merci très chère !
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